Faut que ça déchire...
L'homosexualité est bien présente aussi dans le monde du foot, et ça n'a rien de spécial... Un livre-témoignage à découvrir sans plus attendre...
Fiche
technique
Roman français
Date de parution : 1er décembre 2009
Ecrit avec la collaboration d’Alexandre Delmar
Genre : témoignage édifiant
144 pages
Edité chez Textes Gais
Pour avoir eu la chance de lire ce livre, Yoann Lemaire livre un véritable témoignage sur son propre parcours d’adolescent ardennais découvrant son « homosexualité avec Jérémy » comme il le rappelle et décidant de l’assumer à force d’entendre des insultes homophobes sur les terrains.
Yoann est le seul joueur de football homosexuel! Non, vous ne rêvez pas! Et si j’ai à cœur d’en parler ici, même si je ne connais pas très bien le sujet car le football n'est pas du tout une passion, je ne regarde pas les matchs à la télévision, ni joue au football avec des amis. Je n’ai, pour ma part, jamais été victime d’homophobie. Par contre, j’ai entendu beaucoup de propos très déplaisants dont l’origine est ce triptyque bêtement ordinaire : machisme, racisme et homophobie de tous les jours, dans les petites villes. Et croyez-moi, des homos dans le foot j’en connais. Des amateurs comme des professionnels! Ils ont tous un point commun : ils sont mariés ou en couple, avec femme et souvent – très vite – avec enfants. TOUS. Ce qui ne les empêche pas de vivre leur sexualité dans le secret des lieux de drague plus ou moins glauques. Les autres ont quitté le milieu associatif ou professionnel pour vivre leurs amours masculines en sacrifiant sur l’autel de la haine leur passion footballistique. Yoann, a eu le courage de faire face et de poser une première pierre dans la lutte contre l’homophobie ordinaire dans ce milieu. Il en est un héros et, hélas, une victime. Mais il fait front et poursuit sa route… avec intelligence, courage, pudeur, gentillesse et abnégation. Un vrai grand sportif humain comme on aimerait qu’ils le soient tous! Merci Yoann et j’encourage les lectrices et lecteurs, intéressé(e)s ou non par le football, à lire son témoignage poignant et fort, à le faire lire et pourquoi pas à convaincre les responsables de clubs à le lire pour en tirer des leçons. Avec Yoann, les mentalités vont évoluer, c’est certain…
Synopsis :
Parmi les 2 300 000 licenciés de la Fédération Française de Football, Yoann Lemaire est le seul
joueur affichant son homosexualité.
Son coming-out ne laisse pas indifférent, méprisé par certains de ses partenaires de club, il reçoit pourtant le soutien de
grands footballeurs.
Dans ce livre touchant, Yoann nous révèle, via sa propre expérience, qu’aujourd’hui encore, foot et
homosexualité ne sont définitivement pas compatibles.
Son amour partagé pour Jérémy, lui aussi footballeur, ne résistera pas à la pression qui pèse sur leurs sentiments.
http://www.youtube.com/watch?v=8tTR_SWPjbE
http://www.youtube.com/watch?v=XB_d_rfqoZA&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=rcQk28DI4-U&feature=related
Mon avis : « Le foot c’est pas un sport de tapette »
Bravo Yoann Lemaire pour ton courage, garde le sourire, beaucoup de gens sont avec toi...
Bravo Yoann, tu as beaucoup de courage à dénoncer cette discrimination inadmissible de nos jours.
Ton témoignage est très important...
Un peu de militantisme sur
ces pages ne pourra faire de mal. Car mine de rien c’est un acte militant non négligeable qu’a fait Yohann Lemaire en écrivant Je suis le seul joueur de foot homo, enfin
j’étais… C’est une action symbolique qui tranche dans le lard: à entendre les propos de certains, voire de la majorité des sportifs, l’homosexualité est un tabou encore majeur dans le
milieu. Non pas que les préférences sexuelles doivent être un argument à mettre sur la balance lorsqu’il s’agit d’évaluer des performances sportives. Mais quand des enjeux financiers sont en jeu,
force est de constater que l’image publique d’un joueur de football doit rester lisse. Et pourquoi le fait d’être homo ne serait pas considéré comme tel, demandez aux sponsors.
Dans son village des Ardennes, le petit Yoann grandit en admirant ses idoles, les joueurs de foot. Il aime se
sport à la folie et délaisse quelque peu ses études, préférant les stades aux salles de cours. Il grandit en jouant innocemment avec ses potes, découvrant petit à petit des penchants homosexuels
qu’il ne sait pas encore nommer. Fan de l’équipe de l’Opympique de Charleville-Mézières, il va assister avec consternation à la relégation de l’équipe en National et à son dépôt de bilan. Plus
tard, l’entraîneur du club de Chooz, le village voisin, recrute Yoann : c’est le début de sa carrière en amateur. Bientôt intégré à la sélection des Ardennes, Lemaire vit enfin sa passion au
grand jour.
Le style littéraire de Je suis le seul joueur de foot homo, enfin j‘étais… n‘est pas
flamboyant. Et on ne peux le reprocher à Yoann Lemaire, qui n’est pas un écrivain. Il retranscrit cependant fidèlement et avec beaucoup d’authenticité son histoire, qui est très
intéressante. L’aide apportée par Alexandre Delmar dans le projet est d’ailleurs visible : on sent bien la patte de l’auteur de romans à thématiques gays. Ce qui n’est pas forcément un
atout monumental : Delmar a tendance à rendre mièvres certaines situations, en particulier lorsque sont évoqués les aventures intimes du personnage. On a parfois l’impression de se
retrouver dans un roman Harlequin, mais qu’importe : ici c’est la force du témoignage qui prévaut sur tout le reste.
Car Je suis le seul joueur de foot homo, enfin j’étais… nous emmène dans les coulisses d’un
monde dur, où l’homophobie règne insidieusement. Le nombre de situations conflictuelles dans lesquelles a pu se trouver Yoann Lemaire du simple fait de son coming-out est tout à fait
hallucinant. On vibre avec lui lorsqu’il tente de se défendre contre des cons joueurs ou des supporters l’insultent ou prenne à partie sa mère. On s’étonne de la tranquille passivité de ses
dirigeants, qui iront jusqu’à lui retirer sa licence alors qu’il est un des meilleurs joueurs de l’équipe. Tout ça parce qu’il a souhaité promouvoir, avec l’aide du Paris Foot
Gay, des valeurs fraternelles, ou juste de tolérance. On est peut être ici en présence un petit livre mais qui mérite d’être salué : c’est avec des petits pas qu’on finit toujours par
avancer.
Je ne suis pas fan du coming out. Je trouve quelque peu agaçant de devoir parler de sa sexualité à autrui. A-t-on jamais vu un hétéro faire le sien? Ou vous apprendre qu'il est éjaculateur précoce, qu'elle est clitoridienne? Mais bon, l'homosexualité concerne la sexualité, et comme elle pose apparemment problème, il faut bien parfois en passer par là.
Il y a deux façons de le faire : en privé ou en public. En privé, cela concerne la famille, les amis, les collègues. En général, ça se passe bien, même si une personne sur deux vous confie sur un ton un peu ironique: "Tu sais, je le savais depuis longtemps!" Même ceux qui, quinze jours plus tôt, essayaient encore de vous caser avec un boudin de leurs amies. Les gens n'aiment pas donner l'impression d'avoir été dupes.
En public, c'est autre chose. Mais d'abord, pourquoi faire son coming out en public si on n'est pas quelqu'un de connu ou de représentatif? Ricky Martin, Ruquier, Gareth Thomas, Matthew Mitcham, un général, un ministre: OK. Mais Yoann Lemaire? Qui le connait? Et surtout, qui le connaissait avant qu'il ait écrit un livre intitulé: "Je suis le seul joueur de foot homo… enfin, j'étais!" ? Un jour, YL a avoué son homosexualité à ses coéquipiers. Mal lui en a pris, apparemment, puisque cela lui a posé des problèmes et qu'il a dû quitter l'équipe. D'où le livre.
Moi, j'avoue que cette anecdote m'embarrasse. D'abord, parce que je vois mal le lien : c'est en tant que Yoann Lemaire qu'il a fait son coming out, pas en tant que footballeur. Il en pâtit aussi en tant que footballeur, certes, mais au même titre que n'importe quel anonyme qui fait son coming out risque de perdre son boulot quand la nouvelle se répandra - et elle se répandra. Pour moi, YL a fait un double coming ou : en tant qu'homo et en tant que footballeur. Parce que, je ne voudrais pas être méchant, mais YL, footballeur à Vireux dans les Adennes, avouant son homosexualité, c'est pas vraiment une info people pour Closer, ni pour L'Equipe. Tout juste pour Têtu. Je compatis à ses déboires, mais je ne vois pas l'intérêt d'en faire un livre. Surtout un livre intitulé "Je suis le seul joueur de foot homo… enfin, j'étais!" qui nous donne l'impression qu'il n'y en avait pas d'autre, et que désormais il n'y en a plus d'autre. On a fouillé partout, on a demandé à tout le monde, on a trouvé que celui-là. En tout cas, c'est lui qui le dit. "Je suis le seul…" Qu'en sait-il ?
L'intérêt du coming out public d'une célébrité, c'est qu'il conduit les obtus et les rétrogrades à se poser quelques questions saines : ah bon, on peut être un rugbyman de premier plan, l'image même de la virilité triomphante, et aimer les garçons? Un plongeur homo peut battre à la régulière tous les plongeurs hétéros de la planète? Un gay peut monter sur la plus haute marche d'un podium olympique? Ce sont ces réflexions qui ébranlent, qui font bouger. La confession de YL ne remue pas le problème d'un millimètre. Quoi? On peut être un footballeur anonyme au fin fond des Ardennes et être homo ? Non! Putain de scoop!… Désolé que YL soit dans la merde, mais il s'y est mis tout seul, et l'image des homos dans le foot n'a pas varié d'un pouce. Coming out inutile, donc, puisqu'il n'a pas été suivi par d'autres, plus spectaculaires (ah, si Gourcuff… ah, si Ronaldo… ah, si Drogba…).
Yoann Lemaire a eu un acte courageux dont les conséquences sont désagréables, mais il ne faudrait pas qu'il croit que son acte est politique et qu'il est gros de lendemains qui chantent. C'est un coup d'épée dans l'eau, un tir à côté de la cage. Pour moi, le foot est naturellement homophobe. C'est un sport à part dont personne ne peut parler sereinement, pas plus ses détracteurs que ses adorateurs. Le seul sport, à mon sens, intimement lié à l'hétérosexualité. Et peut-être même pire que ça: à l'homophobie. Moi, ce qui m'intéresserait vraiment dans l'univers du foot, c'est le coming out d'un véritable homophobe. Là, ça deviendrait passionnant.
Lire les quinze premières pages de cette biographie :
http://issuu.com/textesgais/docs/je-suis-le-seul-joueur-de-foot-homo-par-yoann-lema
La presse en parle, lire l'article de Têtu:
http://www.tetu.com/actualites/france/yoann-lemaire-le-coming-out-pas-si-rose-dun-footballeur--16706
Une interview de Yoann Lemaire:
YOANN LEMAIRE :
« (…) je ne supportais plus les insultes sur les terrains de foot comme « Pédé », « Tarlouze », « Tapette », « Pédale » et j’en passe... »
Les Toiles Roses : Yoann, tout d’abord merci de te prêter à l’exercice de l’interview pour Les Toiles Roses. Pourrais-tu te présenter à nos lectrices et lecteurs ?
Yoann Lemaire : Avec plaisir Daniel. J'ai 27 ans et j'habite dans les Ardennes, plus précisément dans un village de la pointe des Ardennes, une avancée française en territoire belge. J'y suis né, et j'y ai toujours vécu. Je travaille comme technicien de maintenance dans une usine locale qui produit des briques réfractaires. Tout mon univers est là ! Les collines boisées à perte de vue, mes prairies, mon étang, mes animaux et… le football.
Comment en vient-on à écrire un ouvrage autobiographique intitulé Je suis le seul joueur de foot homo. Un sentiment d’urgence, un besoin de militer ou une preuve de désespoir ?
J'ai décidé d'écrire ce livre quand j'ai réellement pris conscience qu'il y avait un vrai problème entre le sport et les homosexuels. Vous le savez, on ne connait pratiquement aucun sportif homosexuel de haut niveau : pourquoi ?
Pour ma part, malgré le soutien de pratiquement tout mon club, du Paris Foot Gay, du Paris Saint-Germain, de Vikash Dhorasoo, des médias, des personnalités politiques… face à de l'homophobie flagrante d’une minorité agissante, mon club a préféré me « mettre sur la touche ».
Yoann Lemaire avec Vikash Dhorasoo
Tu le sais comme je te l’ai dit lors de nos conversations téléphoniques, ce qui m’a surpris agréablement dans ton témoignage, c’est que tu as centré ton récit sur le foot et quelques épisodes de ta vie familiale et personnelle. Pour ces derniers, tu es d’une grande pudeur et tu ne tombes pas dans le piège de l’étalage et de la provocation. Était-ce une volonté forte dès le départ et pourquoi ?
Oui, j'ai décidé de parler avec beaucoup de pudeur et de respect pour mes proches. La maladie et le décès de mon père m'ont beaucoup affecté. Je devais en parler pour me soulager et remercier les personnes qui sont restées proches de nous durant ces moments très difficiles.
Puis il y a un effet d’accumulation, suite au décès de mon père, Jérémy a préféré arrêter notre « amitié particulière », c'est à cet instant que j’ai compris que j'étais amoureux d'un garçon... donc homosexuel. Je l'ai vécu comme un drame.
À la lecture de ton livre (dont nous n’allons pas dévoiler tout le contenu), le lecteur peut avoir l’impression que tu as fait ton coming-out directement dans ton club avant ta famille. Est-ce le cas et pourquoi ?
Oui, j'ai décidé d'essayer d’intégrer ma différence par le biais de ma grande passion, le football. J'étais incapable de parler d'homosexualité à qui que ce soit ; progressivement j'ai donc fait des allusions et des sous-entendus à mes copains du foot, avec toujours beaucoup d'humour.
Mais je le vivais mal, je ne supportais plus les insultes sur les terrains de foot comme « Pédé », « Tarlouze », « Tapette », « Pédale » et j’en passe... Elles venaient aussi bien de mes adversaires, que du public ou encore de mes coéquipiers. Je suis devenu inconsciemment pour ces raisons un joueur impulsif, violent et agressif. Puis j'en ai eu marre de me cacher et je me suis dit : pourquoi ne pas être sincère ?
J'ai donc décidé de dire la vérité… que j'étais homo avec « tel joueur », comme si je ne l'étais pas en général... C’était un début.
Ce fut un grand soulagement !
Question plus personnelle, comment a réagi ta famille à cette sortie du placard ?
Je n'en ai jamais parlé avec ma famille. Jamais. Sans doute que je n'assume toujours pas d'être homosexuel et le fait de ne pas leur laisser le choix. Après mon coming-out sportif, j'ai perdu des amis et des copains car mon homosexualité les dérangeait... Tant pis. Mais pour ma famille proche, c'est différent, j'ai trop peur de les perdre. Cependant, d'après mes amis, ma famille proche est fière de moi et me soutient ! Mais je n'ose toujours pas en parler...
Pour avoir été responsable gay d’un club de foot, je sais que les joueurs ne comprennent pas toujours les choix des entraîneurs (ce qui cause continuellement des bisbilles entre les équipes seniors et à l’intérieur même des équipes). Es-tu absolument certain que ton éviction du terrain était due à une homophobie rampante avant les incidents avec un joueur particulier ? Ton entraîneur, que tu estimais, est-il coupable de complicité par passivité ?
Malheureusement c’est mon sentiment. Je ne peux pas dire que mon entraineur était homophobe, mais il a toléré l’homophobie et même pire, il a promu un joueur très médiocre en équipe première quelques jours après que ce même joueur ait clairement dit à des journalistes (devant les caméras) qu’il n’aimait pas les gays, en ajoutant des insultes à mon égard.
Mon sentiment est clair : je pense réellement avoir été sanctionné par le coach pour éviter d’éventuels problèmes dus à mon homosexualité. Certains joueurs ne voulaient pas ou plus jouer avec moi… sans aucune raison « officielle ».
Le fait de ne pratiquement plus jouer (remplaçant cloué sur le banc, « oublis » de convocation aux matchs, suspensions bidon, rétrogradations dans les équipes inférieures) faisait que je ne jouais plus à mon poste… Et donc, effectivement, un gay dans un club de foot est sans doute pour certains sujet à emmerdes !
De toute façon, dans le football, les gens ne se sentent pas concernés par l’homosexualité et l’homophobie ; pour eux, la question et le problème ne se posent même pas. D’après eux, il n’y a tout simplement pas d’homos dans le foot ! Ils nient la réalité. Et je sais, tu sais et nous savons tous que ce n’est pas possible !
Yoann Lemaire avec Ludovic Giuly
La publicité nationale apportée au comportement d’un joueur précis (voir la lettre ouverte du Paris Foot Gay au Président Jean-Pierre Escalettes de la Fédération Française de Football à la suite de cette interview) qui t’insulte devant les caméras et les micros ne semble absolument pas avoir ennuyé cette « personne » le moins du monde. Est-ce toujours le cas et comment expliques-tu cette attitude écœurante ?
Le plus grave, c’est que ce joueur joue toujours sans aucun souci ! Dans l’indifférence générale de tout le monde ! Il peut même continuer de proférer ses propos homophobes et se vanter d’avoir eu ma peau… C’est honteux. Pire, il se vantait auprès de mes anciens coéquipiers du club d’essayer de me faire un procès pour, a priori, diffamation et non respect de ses droits d’images. Enfin, n’importe quoi…
Ce joueur est monté en puissance puisque le club ne l’a jamais empêché de faire. Donc par la suite, il s’est senti fort. Et pour jouer le malin devant ses copains, il n’a pas hésité à donner une interview abominable à une chaîne de télévision nationale.
De même, ton ancien président de club réussit le tour de force devant les caméras à insinuer que tu es coupable (de provoquer, d’avoir la grosse tête, de vouloir te faire de la pub…) et non une victime… ce qui est profondément révoltant. Que cache ce moyen de défense honteux de sa part ? Et pourquoi le comité (l’organe directeur du club) n’a-t-il pas réagi ?
Lors d’une interview télévisée, le président du club a dit effectivement qu’il y avait de l’homophobie avec ce joueur depuis deux ans, mais que c’est moi qui instrumentalisais les journalistes pour faire parler de moi. Me faire de la pub ? Mais c’est de la folie !
Il faut comprendre que je n’ai rien à gagner de parler de mon homosexualité à des journalistes. J’essaie juste d’expliquer ma situation pour éventuellement faire évoluer les mentalités, parce que quand les journalistes partent, je me retrouve bien seul dans ma région ! Face aux critiques, aux reproches et à la méchanceté ! Je comprends mieux pourquoi aucun footballeur n’ose faire son coming-out. D’ailleurs, cela vaut pour le sport en général.
La lutte contre l’homophobie doit, à mon sens, aller de paire avec la lutte contre le racisme et le machisme au sein des clubs. Quand on voit le marasme et les difficultés pour monter simplement une équipe féminine dans un club, j’ai peur que la lutte soit bien longue. Qu’en penses-tu ?
Oui hélas, très longue. Surtout sans l’aide des pouvoirs publics. Il faut faire évoluer les mentalités ! Que l’on arrête d’hétérosexualiser et de machiser les plus jeunes de façon caricaturale, pour devenir absolument des compétiteurs ! Uniquement gagner et oublier les bases fondamentales du sport : apprendre à respecter ses partenaires et ses adversaires, quels qu’ils soient.
À mon sens, le sport peut être un bon moyen pour accepter les différences des uns et des autres !
Yoann Lemaire avec Vikash Dhorasoo
Le Paris Foot Gay t’a semble-t-il apporté beaucoup de soutien dans cette épreuve. Que représente ce club pour toi ?
Le Paris Foot Gay m’a toujours soutenu. Je suis maintenant convaincu que grâce au soutien du Paris Foot Gay, mon club ne pouvait pas m’abandonner dès le début. Cela a retardé l’échéance. Nous sommes allés plusieurs fois au Parc des Princes pour participer au tournoi B.Yourself, organisé par le PSG et le Paris Foot Gay. Maintenant, je suis convaincu que c’était donnant/donnant.
Comment ont réagi les joueurs et le comité de ton ancien club à la sortie de ton livre ? As-tu des retours (et notamment de ton ancien président) ?
Un retour négatif ! Et inquiétant. J’ai pris un avocat pour me défendre, concernant une facture que le club refuse de payer. Comme par hasard ! Lors du tournoi B.Yourself, comme tous les ans, j’organisais un déplacement en bus pour Paris avec les joueurs de mon club. Le club payait ensuite les factures grâce aux subventions de la Mairie. En 2009, à la réception de la facture, le président du FC Chooz, cette fois, a demandé à la compagnie de transport de transférer la facture à mon adresse personnelle. Le club refuse donc de payer. Mais mon avocat est sur l’affaire.
Et ton premier grand amour, qu’en a-t-il pensé (si tu as de ses nouvelles) ?
Je l'ai contacté pour lui parler de mon livre. Je voulais absolument en parler avec lui pour ne pas qu'il n’en souffre pas d'avantage. Il m'a juste répondu que je pouvais écrire ce que je voulais concernant notre relation, mais ne pas donner son vrai nom. Ce garçon est étonnant, il donne l'impression d'être un véritable hétérosexuel macho, homophobe, mais il reste célibataire et on ne le voit jamais en couple. D'ailleurs, le plus étonnant, c'est qu'il est venu jouer au football au FC Chooz sans savoir que j'arrêtais le foot. Nous n’avons donc pas joué ensemble. Il a évolué dans ce club trois mois, puis il a démissionné et changé de club. Surprenant, non ?
Yoann Lemaire avec Frédéric Thiriez, président de la Ligue de Football Professionnel
Quelle sera la prochaine étape de la lutte contre l’homophobie dans le milieu du football ?
Que les pouvoirs publics et les hautes instances du football reconnaissent l'homophobie comme une discrimination. La Ligue de Football Professionnel fait des efforts énormes, mais la Fédération Française de Football s’en moque complètement.
Il faut intégrer des modules éducatifs sur les discriminations dans les formations des éducateurs, formateurs et arbitres de foot. Par exemple, un éducateur de jeunes ne doit pas les surmotiver en les comparant à des « tapettes » ou des « pédés » (et ce n’est pas si rare dans les petits clubs).
Naturellement, il faut de la répression. Sinon ça ne servirait à rien. Quand des personnes tiennent des propos homophobes ou commettent des actes homophobes, les hautes instances du football doivent sanctionner avec sévérité.
Rappelez-vous le cas Louis Nicollin, président de Montpellier, qui insulte un joueur d'Auxerre de « petite tarlouze » devant les caméras. C’est encore plus navrant d'entendre ça de la bouche d'un président de club !
Enfin, la sensibilisation est primordiale, par exemple le Paris Saint-Germain organise une fois par an, lors d'une journée de Ligue 1, une grande soirée de sensibilisation contre l'homophobie. Si tous les clubs de Ligue 1 et 2 en faisaient autant, je pense que les mentalités évolueraient plus vite.
Une dernière question plus personnelle : le grand amour, tu y crois toujours ? Et si c’était un autre footballeur qui désire rester dans le placard, l’accepterais-tu ?
Si je venais à tomber amoureux d'un sportif, qui souhaite ne pas parler de son homosexualité, je le comprendrais parfaitement.
Pour le grand amour... peut-être un jour, mais cela me fait peur. Je suis sensible et j'ai peur d'en souffrir. J'ai eu dernièrement un petit copain, c'était extraordinaire, enfin j'étais vraiment en couple et j'en étais fier. Ce garçon est parti à Montréal pour ses études. Je suis allé le retrouver deux semaines. Puis quand je suis reparti, j'ai compris que je ne le reverrais plus. Il a préféré couper les ponts. Il ne se sentait pas capable d'avoir une relation à distance. J'en ai beaucoup souffert. J'y pense encore souvent. Surtout qu’il m’avait beaucoup aidé quand j’ai décidé d’arrêter le football. Il était vraiment là, aux bons moments.
La médiatisation de mon histoire l’a éloigné. Il ne préfère plus avoir de contact avec moi car sa famille ne sait pas que leur fils est homo !
Merci Yoann pour ta disponibilité, ta gentillesse et ton combat. Bonne chance et surtout beaucoup de bonheur.
Toutes les photos reproduites ici sont © Yoann Lemaire.
LETTRE OUVERTE DU PARIS FOOT GAY
À MONSIEUR JEAN-PIERRE ESCALETTES,
PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE DE FOOTBALL
Paris, le 8 mars 2010
Monsieur le président,
Tout d’abord, nous tenions à rappeler la réaction par voie de communiqué de presse de la Fédération Française de Football, lorsque le Créteil Bébel a refusé de jouer contre notre club :
« [La FFF] ne peut rester insensible à la controverse suscitée par l'annulation de ce match.
Ainsi, la FFF réaffirme sa détermination à lutter, chaque jour et sur tous les terrains, contre toutes les formes de discrimination et bien sûr contre l'homophobie.
Conformément à sa mission générale d'organisation du football en France et dans le cadre notamment de son soutien aux actions de la Fondation du Football, la FFF veille à préserver les notions de respect et de tolérance considérant qu'elles doivent plus que jamais rester le socle de la pratique du football. »
Nous avons pris acte de cette déclaration et souhaitons aujourd'hui attirer l’attention de la FFF et attendons une réaction de sa part au sujet d’un cas d’homophobie notoire au sein d'un club affilié, le FC Chooz.
En juin dernier, Renaud Charpentier, un joueur de ce club, a eu un comportement sans équivoque devant les caméras de France 3 vis-à-vis d’un autre joueur, Yoann Lemaire, qui ne fait plus mystère de son homosexualité. Le reportage portait justement sur la difficulté d’être un joueur de foot gay dans un club de football. Renaud Charpentier n’a pas non plus hésité à arracher le logo "Carton rouge à l'homophobie" floqué sur les maillots du FC Chooz, signataire de la Charte contre l’homophobie (charte également signée par la LFP, le PSG, l’AJA et l’OGC Nice).
Le Paris Foot Gay a alors demandé à plusieurs reprises au président du FC Chooz de prendre les mesures adéquates pour permettre à Yoann Lemaire de jouer au football dans un climat de respect dénué de toute haine homophobe.
À ce jour, non seulement aucune sanction n'a été prise contre Renaud Charpentier, mais il fait toujours partie du club.
Yoann Lemaire a dû, quant à lui, quitter le club, abandonnant ainsi à regret sa passion pour le football. Son témoignage, publié aux éditions "Textes gais" et intitulé Je suis le seul de joueur de foot homo, enfin j'étais... en dit long sur son calvaire. Je vous invite à lire cet ouvrage émouvant, salué par la critique.
À cet égard, il apparaît totalement incohérent de tolérer qu'un joueur ayant tenu publiquement des propos homophobes, puisse encore jouer dans le championnat de la Fédération Française de Football.
Au regard de tous ces éléments, nous vous demandons d’intervenir auprès des dirigeants de ce club, conformément au combat contre les discriminations que vous semblez vouloir porter.
Nous vous réitérons bien entendu notre proposition de rejoindre les signataires de la Charte contre l'homophobie, comme la LFP l’a fait.
Nous espérons que ce cas sera pris en compte le plus rapidement possible.
Dans cette attente, nous vous prions d’agréer, Monsieur le président, l'expression de nos sentiments les meilleurs.
Pascal Brèthes,
Président du Paris Foot Gay
Pour finir, retour sur un ancien article sur mon blog avec des garçons footeux et sexy...